Nous sommes déjà en 1984

Dans les pays riches et dits démocratiques, l’être humain se rêve libre. Tous les jours il remplit les tâches qui lui sont attribuées, consommant comme il lui plaît, sortant avec ses amis, regardant les émissions télévisées avec la sensation d’avoir une ouverture sur le vaste monde. Il est heureux et satisfait, parce qu’il vient d’être nommé commercial de l’année, parce que grâce à cette ténacité que tous désirent acquérir il a réussi à vendre ce qu’il devait vendre, parce que grâce à ses responsabilités il se sent important, parce qu’il a pu se payer le dernier Ipad ou Smartphone… Il peut ainsi contempler son nouveau joujou, le montrer à ses proches, avant qu’une autre publicité ne lui dévoile qu’un autre objet, plus neuf, l’attend au magasin et lui apportera une nouvelle satisfaction. Entre son téléphone dernier cri et son écran plat, il est au fait de tout ce qui se passe dans l’univers. Les média lui donnent la sensation de connaître les événements, en temps et en heure, en n’importe quel endroit du globe. Les séries télévisées lui procurent ce qui lui manque dans sa vie quotidienne, un peu d’idéalisme, un peu d’engagement, un peu d’adrénaline. Les émissions de divertissement l’égayent et le détournent des réflexions et des remises en question. La téléréalité l’amuse, il imagine réel ce qui ne l’est qu’à moitié, comme si la réalité ne lui suffisait pas. Il ricane des comportements exagérés des gens derrière son écran, en oubliant que c’est ce qu’il voit généralement autour de lui. En définitive, se noyant sous tant de technologie et d’informations, il ne se rend pas compte qu’il finit par vivre par procuration, et donc par ne plus vivre. Les média lui disent ce qu’il doit penser et comment il doit le penser. Les informations qu’il suit sont reprises et retransmises, véridiques ou non, seule la primeur compte. Il regarde son écran et ne se pose plus de questions, c’est ainsi que sont les choses, puisque la télé le dit… Il ne remet jamais en question ce qu’il y voit. Après tout, si sa vie lui convient, pourquoi devrait-il la modifier pour penser par lui-même?

Les publicités, telles des matraques télévisuelles, font naître le désir. Elles lui dictent ce qu’il a envie de consommer et créent un courant unidirectionnel. Il veut être comme tout le monde, posséder comme tout le monde, mais avant tout le monde, puisque seuls les avant-gardistes sont à la mode. Il ne remet pas en cause sa consommation, il ne s’interroge pas sur l’utilité qu’il pourrait en avoir. A-t-il vraiment besoin de ce qu’il voudrait s’acheter? Cela aussi importe peu, du moment qu’il possède. Plus il consomme et plus il possède, plus il se sent satisfait; l’objet remplace le véritable vécu. L’homme est possédé par ses possessions, sans comprendre que parfois, seul le détachement procure la liberté.

De ce fait, il lui faut travailler pour pouvoir s’offrir toutes les merveilles que le monde moderne lui accorde. Peu lui chaut l’emploi, du moment que les espèces sont sonnantes et trébuchantes; peu lui chaut l’intérêt du travail, du moment que le soir il peut s’avachir devant l’une des nombreuses émissions télé, qui vont finir de lui laver le cerveau. Toute sensation de vide ou d’inaccomplissement étant immédiatement étouffée dans l’œuf.

Les quelques libertés qu’il possède lui sont reprises les unes après les autres mais il ne s’en rend pas compte. Il ne se rend pas compte que les média lui assènent de fausses vérités, pour lui faire croire qu’il a besoin de plus de sécurité et que cette sécurité doit venir de l’Etat (mais attention, pas de légitime défense, sous peine d’être considéré comme un criminel). Du coup, il accepte qu’Internet soit plus sécurisé, que les sites soient plus surveillés, il accepterait même d’installer des logiciels proposés par l’Etat du moment qu’ils prouvent qu’il ne télécharge pas illégalement. Mieux, de merveilleux organes de surveillance ont été créés et présentés comme des liens sociaux, funs et amusants. Il se précipite pour en faire partie, élargir son réseau, être à la page… fournissant lui-même des informations qu’il aurait refusé de donner si on les lui avait autoritairement demandées. L’Etat a trouvé le meilleur moyen de surveiller ses citoyens : Facebook et consort. Chacun y met sa vie, photographies, relations, contacts, détails privés. Dernière innovation, les emails surveillés de Fb, ou l’un des plus efficaces organes de Big Brother qui se met actuellement en place. Tout ce qu’il dit à ses amis sera connu. S’il outrepasse ses droits, ses emails seront censurés. Son employeur pourra dorénavant garder un œil sur lui et il en sera en partie responsable. Mieux, les derniers logiciels en date qui permettent de dire et de présenter sur des cartes virtuelles les endroits où il se trouve et ce qu’il y fait…

1984, écrivit un jour un certain Orwell?

Hadopi, la suite

Comme tout le monde le sait maintenant, les premières lettres du système Hadopi seraient parties… Ce qui change avec cette dernière mouture, c’est que ce n’est pas le piratage qui est reproché à l’internaute mais l’absence de protection et de surveillance. Un déficit de protection et de surveillance ? En effet, si la ligne du particulier est utilisée pour télécharger de manière illégale, même s’il n’en est pas le responsable, il en sera tenu pour… Alors qu’aujourd’hui il est plus que reconnu qu’une sécurité Internet, même avec la meilleure volonté du monde, ne peut être infaillible. Dans ce cas, que faire ?
Hadopi propose une solution innovatrice et révolutionnaire : la personne recevant sa lettre de mise en garde et désirant protéger sa ligne, mais ne sachant comment procéder, aura une solution toute trouvée : installer un logiciel fourni (gracieusement ou non, cela n’est pas encore tranché)  par… Hadopi.
Ce fameux logiciel n’est autre qu’un cheval de Troie. Une fois installé dans l’ordinateur, il surveillera toutes les pages visitées sur Internet. Ce ne sera plus seulement le téléchargement illégal qui sera surveillé, mais bel et bien la vie entière de l’utilisateur.
Bien entendu Hadopi ne vise absolument pas à l’implantation de ce logiciel… malheureusement, ce sera le seul et véritable recours. De manière détournée, il sera conseillé de se le procurer pour se protéger définitivement.
Mieux qu’Edvige et tous les projets de collecte de données, ce logiciel réussira là où tout le reste a échoué. En effet, une personne qui ne s’y connaît pas du tout en informatique et qui n’a rien à cacher ne verra pas pourquoi elle ne devrait pas l’installer… Puisque ce sera le seul moyen de s’innocenter, pourquoi hésiterait-elle ? Et c’est la porte ouverte à Big Brother et compagnie, avec la bénédiction même de celui qui devrait s’en prémunir. Car, une fois le logiciel lancé, qui sait où finiront les données ? Même si les créateurs de ce merveilleux projet jurent leurs grands dieux que nulle dérive ne sera possible, on sait ce qu’il en est… L’Etat, et les personnes préposées à ce service, connaîtront bientôt tout de votre vie et de vos opinions… et même si vous n’avez rien à cacher, qui peut réellement savoir ce qui se passera avec ces données ? Lorsque vous serez mis dans des cases, parce qu’étant pour ou contre tel ou tel parti politique, lorsqu’une décision de l’Etat vous hérissera et vous fera récriminer, lorsqu’un dossier complet contiendra toutes vos colères et vos plaintes…
Accueillir ce logiciel dans son ordinateur, c’est accueillir un objet qui se changera en monstre. Quoi qu’en disent l’Etat et ses concepteurs, Hadopi vise à diriger votre vie, en passant par la dernière chose qui n’était pas encore véritablement accessible : votre ordinateur.
Car il ne faut pas oublier qu’un cheval de Troie peut aussi avoir accès à vos données personnelles. Qui n’entrepose pas de photographies, de correspondance, de réflexions et de morceaux de vie dans sa machine ?
A bon entendeur…

« Pourquoi partir? Pour mieux revenir »

Comme le dit un proverbe bien connu et diversement attribué, le voyage est constructif à plus d’un titre. Il permet d’abord de se recentrer soi-même, de redécouvrir ses limites et ses besoins, et de renouer avec une certaine simplicité que nous enlève le monde moderne. Partir à l’aventure, c’est abandonner sa sécurité pour affronter un environnement différent. Que ce soit un pays dont l’on ignore la langue, des gens que l’on ne comprend pas, de nouvelles règles auxquelles il faut s’adapter… un voyage est plein de découvertes, non seulement humaines lorsque la communication arrive à se faire, mais surtout personnelles.
Devoir gagner un lieu différent chaque jour rend le voyageur un peu léger, comme s’il était de partout et de nulle part à la fois. Un matin il appartiendra aux ruines qu’il visite, le lendemain il sera partie intégrante de ce petit restaurant familial, et le surlendemain il deviendra particule perdue dans la masse du train qui l’emmènera à son prochain point… En n’appartenant à aucun lieu, le globe-trotteur ne peut que développer sa propre personnalité. Plus il pérégrine et plus il comprend que les choses importantes sont celles qui ne laissent nulle trace, hormis le bonheur relatif au souvenir. Tout être a en tête un moment particulier, presque sacré, condensé d’instant, qui lui a laissé le goût du bonheur. Plus qu’un objet, c’est une pensée souvenir qui contient la plus grande émotion. A part ces instants éphémères, quelles sont les choses qui nous ont le plus touché? Quand on se souvient d’un moment, on se souvient d’une sensation, d’un sentiment, d’une impression, d’une fugacité même… mais éternels.
En voyageant l’être apprend la légèreté. La légèreté des besoins : nourriture du corps et de l’esprit. Une fois ce fondamental comblé, l’âme vagabonde refaçonne sa liberté. La liberté des chemins, lorsque l’explorateur ignore où il sera demain mais qu’il sait qu’il sera quelque part… peut-être, en effet, la route importe-t-elle parfois plus que la destination, mais ne nous leurrons pas : il doit savoir un minimum où porter ses pas.
D’aucuns assimileront cette traversée, de soi et des routes, à une fuite. Peut-être, quelque part, fuit-on la routine et le carcan de la modernité. Peut-être désire-t-on retrouver un souffle perdu, un affranchissement des frontières de l’esprit. On n’est jamais plus soi-même que lorsque l’on voyage. Face aux éléments, aux impondérables, aux imprévus également, le bourlingueur n’a que lui-même et découvre que rien n’est contrôlable. Il comprend qu’il dépend du bon vouloir de la mécanique, du temps, des espaces… et cette prise de conscience, quelque part, est salvatrice. Renoncer à son désir de contrôle pour retrouver le plaisir du moment, de ce qui surgit et émerveille. Le voyageur apprend à se rattacher à son macrocosme tout en s’en détachant. Il apprend que si le corps est entravé, l’esprit ne l’est jamais ; que si la matière retient, la patience est un mal nécessaire pouvant devenir un bien.
En revenant, ce nouveau nomade redécouvre la facilité relative de notre monde civilisé. Tout est accessible, tout est rapide, tout est presque sûr… les frontières sont bien dessinées et bien nettes; on doit se soucier à la fois de peu et de beaucoup, et surtout de beaucoup d’inutile. Le confort est un luxe agréable auquel on s’habitue trop vite.
Lorsque l’aventurier reprend goût à sa routine, il ne tarde pas à désirer repartir : pour être soi-même sans contraintes, n’être empêché par personne, penser et vivre ce qu’il veut, se détacher pour mieux retrouver l’essence de l’univers…
Voyageur serait le plus beau métier du monde.

Hadopi revient sur le tapis

Après Hadopi première version, voici Hadopi2, qui cette fois-ci propose de surveiller les courriers électroniques. Le droit d’auteur s’appliquant partout, les emails sont donc leur prochaine cible. L’échange de fichiers est prohibé. Même nos conversations MSN seront surveillées, toujours pour éviter cette infraction au droit d’auteur.
Où est la limite? Surveiller les conversations des gens, n’est-ce pas, en quelque sorte, les mettre sur écoute? Où est le droit à la vie privée? Est-ce légal de mettre son nez dans les courriers des gens et de fureter dans leurs correspondances? La vie privée perdrait-elle tout son sens?
Il est sûr qu’avec Internet et tous les échanges que cela entraîne, la vie privée est devenue un peu plus publique. Comme le disent certains, pour ceux qui désireraient demeurer cachés, il faut s’éloigner d’Internet… mais ne peut-il y avoir une alternative complaisante? Pourquoi devrait-on être surveillé jusque dans nos correspondances? N’est-ce pas, une fois de plus, un autre pas vers le Big Brother, si craint et si décrié? L’Etat ne commence-t-il pas par surveiller vos écrits pour ensuite vous empêcher de penser?
Cette assertion peut paraître extrême mais c’est ainsi que les libertés sont restreintes et finissent par disparaître. De tels amendements passent sans que personne ne s’en rende compte, sans qu’aucune voix ne s’élève, et lorsque l’on vient vous arrêter pour une parole de trop, il est déjà trop tard.
Les libertés se défendent dans notre vie de tous les jours. Oui, nous pouvons déjà crypter nos correspondances électroniques – mais n’est-il pas dommage de devoir en arriver là? Et, surtout, n’est-il pas dommage qu’une loi nous y pousse?

La ferme des animaux, naissance et détournement d’une idéologie

La ferme des animaux est un roman de George Orwell, l’auteur de 1984, qui présente, dans cette œuvre, la naissance et la dépravation d’une pensée ainsi que de la société qu’elle entraîne.
Dans la ferme de M. Jones, le cochon Sage l’Ancien a rêvé la liberté pour les animaux. Il leur expose son idée, son rêve d’émancipation, une ferme où les animaux, tous égaux, travailleraient de concert pour s’assumer et subvenir à leurs besoins. Tous seraient égaux et partageraient le fruit de leur labeur. Le cochon édicte une liste de sept commandements qui deviennent les commandements de la révolte.
Sage l’Ancien meurt quelque temps après son discours, mais la graine est plantée. Les cochons Napoléon, Boule de Neige et Brille-Babil peaufinent la nouvelle pensée : l’Animalisme. Menés par Napoléon et Boule de Neige, les animaux se révoltent contre M. Jones et le chassent de la ferme. Les commandements sont écrits sur l’un des murs et une chanson révolutionnaire sert de ralliement et de cri de joie.
Les animaux reprennent la ferme à leur actif et travaillent dur. La production augmente, les animaux consomment le surplus, ils sont mieux nourris et profitent de leur labeur. Le travail physique les éreinte mais chacun participe en fonction de ses capacités physique. L’Animalisme semble avoir gagné, établissant une société de partage et d’entraide.
Malheureusement, comme toute bonne idée, celle de Sage l’Ancien est peu à peu pervertie. Les cochons prennent le pouvoir mais les animaux ont encore le droit de parole. Il y a débat chaque dimanche pour décider de ce qui sera fait et les autres animaux participent à la prise de décision. Le vote est roi. La liberté est sauve.
Les cochons, petit à petit, commencent à s’approprier des choses : c’est d’abord le lait qui, sous prétexte d’être indispensable à la survie des cochons, leur sera réservé ; ce sont ensuite les pommes, pour les mêmes raisons. Les cochons réfléchissent, planifient, et en tant que tête ne participent plus beaucoup à l’entretien de la ferme. Et Brille-Babil tire toujours une bonne explication de ses sabots pour justifier le pourquoi du comment.
Mais Boule de Neige et Napoléon, qui dirigent les réunions, ne s’entendent pas : ils s’opposent continuellement. Un beau jour, Napoléon parvient à chasser Boule de Neige. Et c’est le début de la fin de la belle société. Les animaux ne sont plus égaux, même s’ils continuent de croire le contraire. Alors que Sage l’Ancien voulait une société sans l’argent des hommes, Napoléon tord les premiers commandements et vend les productions de la ferme. Il réduit les portions des animaux. Chacun des commandements est bafoué, Brille-Babil étant le porte-parole des modifications, réécrivant ces derniers de nuit, rajoutant une suite qui justifie les actes de son chef. Des bruits, toujours contradictoires, sont lancés. Les rumeurs courent. Dès qu’une catastrophe se produit dans la ferme, c’est la faute de Boule de Neige, des traces de ses sabots sont même retrouvées aux alentours. Boule de Neige est un traître. L’histoire est réécrite : Boule de Neige, qui s’illustra grandement lors de la révolte des animaux, voit son rôle diminué, jusqu’au moment où il est changé en traître couard. Les animaux baissent la tête, acceptent, subissent, car ils ne veulent pas, bien entendu, que M. Jones revienne.
La ferme des animaux est un magnifique ouvrage, montrant la déviation d’une idée qui, au départ, aurait pu améliorer la condition des êtres. Orwell nous montre que dès qu’il y a un groupe, il y a des ambitions, des désirs et donc des exactions. Les premiers temps de la ferme des animaux réussissent, lorsque le souvenir de M. Jones est encore vivace, lorsque le discours de Sage l’Ancien est encore frais. Mais le temps passant, les cochons prennent le pouvoir, et lorsque le pouvoir entre en jeu, l’injustice, l’asservissement, les détournements également.
La manière dont la situation dévie peu à peu est remarquablement bien rendue. Le lecteur se met à la place des animaux, il comprend leurs réactions. Il peut s’insurger parfois, se demander pourquoi ils ne remettent jamais en cause ce qu’on leur dit, pourquoi ils ne se fient pas plus à leurs souvenirs qu’aux paroles de Brille-Babil ; malgré cela, le lecteur réalise la pression du groupe, il voit les changements qui ne manqueront pas de survenir, il sent que la dérive est proche… et il sait pourquoi les animaux ne réagissent pas. Ils sont tellement ancrés dans leur système, l’idée de départ leur apparaît toujours tellement belle et pure qu’ils ne voient pas les changements qui se font. La pression de la société est trop forte, elle les modèle, même s’ils n’en ont pas conscience. Ils sont clos dans leur monde et, sans regard extérieur, sans connaissance du monde extérieur, il ne peut y avoir de remise en question. D’ailleurs, ceux qui protestent sont peu à peu éliminés. Brille-Babil étouffe toute pensée différente dans l’œuf.
Les animaux sont dominés, acceptent leur situation sans se plaindre et fournissent aux cochons toutes leurs richesses. Et le système, dévoyé, trahit les siens :  lorsque l’animal devient inutile, il est supprimé. Les animaux sont arrivés loin du rêve de départ, de ce carré de terre où les animaux âgés prendraient leur retraite après avoir aidé à bâtir la ferme.
Lorsque le système trahit les siens, il n’y a pas de retour en arrière possible. Plus rien ne subsiste des idéaux primitifs. L’Animalisme n’existe plus. Les animaux ont créé une société pire que celle dans laquelle ils vivaient auparavant et, surtout, ils n’ont pas le courage de se révolter contre les leurs.

Loppsi2, bientôt sur vos ordinateurs

Le gouvernement est déterminé, après Hadopi, à adopter une loi portant le nom de « Loppsi2 » (ou loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure) et qui permettrait aux autorités judiciaires d’installer en toute légalité des chevaux de Troie sur les ordinateurs des particuliers. Les informations collectées pourront être conservées quatre mois et ce délai sera renouvelable sur injonction d’un juge. Avec en outre la création d’un fichier nommé Périclès qui permettrait de croiser toutes les informations rassemblées afin de lutter contre la cybercriminalité.
Ceci dit, afin de lutter contre cette cybercriminalité, il faudra à Périclès récolter de nombreuses informations personnelles sur les internautes, tels que numéros de carte grise, de permis de conduire, mais aussi par exemple des factures… Ces données seraient collectées non plus dans un cadre judiciaire légal mais dans celui de « traitements automatisés de données à caractère personnel concernant toute infraction commise contre les personnes ». Autrement dit, nos données personnelles ne seront plus personnelles et pourront être consultées par n’importe qui, quel que soit notre désir à ce sujet.
Ne serait-ce pas le début de Big Brother? Sous prétexte de lutter contre le terrorisme, l’usurpation d’identité ou encore la pédo-pornographie, ne sont-ce pas plutôt les citoyens que l’on tente d’observer et d’orienter? Des sites seront mis à l’index, et s’il faut vraiment en supprimer certains, combien de temps faudra-t-il attendre pour que des plates-formes de libre échange le soient?  Combien de temps faudra-t-il attendre pour que le contenu de sites de discussions soit filtré? N’est-ce pas une tentative d’empêcher les gens de penser et d’échanger leurs idées? C’était ce qu’avait prévu Orwell dans son excellent roman 1984. Les gouvernants commencent par dire qu’il faut améliorer la sécurité, que ceux qui n’ont rien à se reprocher n’ont rien à craindre. Mais bientôt ceux qui pensent différemment auront tout à craindre et pourront justement se reprocher de ne pas penser comme la masse et comme le veulent nos élus. L’histoire nous l’a déjà pourtant montré : la suppression des libertés commence par un petit pas et se réalise lentement, mais elle se réalise. Désirons-nous vraiment un monde formaté, où tous les gens penseront la même chose? Désirons-nous vraiment un monde où nous risquerons d’être jeté en prison, voire lobotomisé, si nous n’acceptons pas les grandes lignes de pensée de notre gouvernement?
Il faut défendre nos libertés fondamentales et veiller à ce que de telles lois, si elles passent, ne dérivent pas. Car c’est au citoyen qu’il revient de lutter pour pouvoir, en définitive, penser par lui-même. La liberté n’est jamais un acquis.