Six Feet Under, la fin d’une épopée

Après une saison 3 parfaitement réussie, pleine de rebondissements que l’on n’attend pas, la saison 4 est décevante. Déjà la 3 avait un peu mis en sourdine ce pour quoi la série semblait exister, le quotidien du funérarium et des êtres y arrivant pour une dernière « toilette ». Malgré cette mise de côté, la saison 3 restait dans le ton, donnant de plus en plus de place aux personnages, mais de manière intelligente. En outre, ce qui leur arrivait était toujours surprenant, avec d’excellents moments totalement inattendus et une tension bien palpable. En ceci la saison 3 est aussi bonne que les précédentes.
La 4, par contre, est affreusement décevante. Peu de réelle surprise. On finit par se lasser. Les défauts, autrefois attrayants, des héros, les rendent dans cette saison presque détestables. Alors qu’on ne pouvait s’empêcher de les aimer dans la 3, on se lasse dans la 4 de leurs sempiternels doutes et interrogations, comme s’ils cherchaient à tout prix, et contre toute raison, à se rendre malheureux. Cette saison est longue et l’ennui s’installe. On s’enlise.
La 5 est à mi-chemin entre la 3 et la 4. La série semble maintenant être totalement axée sur la vie des personnages plus que sur le funérarium lui-même. Ce dernier est devenu un arrière-plan secondaire, ce qui est vraiment dommage. Par contre, la 5 réserve quelques bonnes surprises et il y a des passages passionnants. Une saison 5 mitigée donc.
Si la saison 4 est décevante et que la 5 laisse parfois quelque peu à désirer, le final est plutôt réussi. L’épisode paraît un peu fourre-tout et trop rapide, comme s’il voulait traiter tous les problèmes des personnages avant de clore le chapitre. Il se produit à la fois trop de choses et trop peu. Certaines sont attendues, ce qui est aussi décevant. Les autres saisons étaient tellement surprenantes et originales que l’on ne peut que s’attrister de la perte de ces qualités… Mais le final est vraiment magnifique, lorsque Claire part pour vivre sa vie, lorsqu’elle part affronter et poser les premières pierres de son futur. Sur Breathe Me de Sia, cette fin est une véritable fin, profonde, pleine d’émotion, et on ne peut que s’en sentir satisfait.

Farscape, une série décalée et intelligente

Il y a quelque temps déjà, je découvrais une série que j’ai fini par énormément apprécier: Farscape.
Farscape relate l’histoire d’un cosmonaute qui, au cours d’une expérience qu’il a lui-même inventée et conçue, est propulsé dans une partie lointaine et inconnue de l’univers suite à un léger problème (une onde magnétique le heurtant de plein fouet et créant un trou de ver ou passage dans la trame de l’espace-temps).
Se retrouvant en plein milieu d’une bataille entre des prisonniers échappés et leurs « surveillants », qui se font appeler les Peacekeepers, le héros est pris en otage par les prisonniers. C’est le début de la grande aventure pour lui, car il n’a pas même les connaissances fondamentales pour survivre.
Ce qui est bien fait est le rendu de la totale surprise et de l’ahurissement qu’il éprouve face à cette nouveauté: nous avons l’impression de voir à travers ses yeux et tout nous paraît nouveau, attrayant et dangereux à la fois. Beaucoup de choses nous échappent car nous aussi nous découvrons ce monde différent.
Ce qu’il y a de bien dans Farscape, c’est que cela nous met face à nos préconçus: comment réagirions-nous si nous étions projetés au milieu d’étrangers, dans un endroit totalement inconnu, pour lequel nous n’avons pas même les connaissances de base? Comment notre personnalité évoluerait-elle, se modifierait-elle?
Ce qu’il y a également d’appréciable, c’est la mise en perspective de la morale: ce qui nous semble moral l’est-il pour tous? Quand, pourquoi et comment transigerions-nous? Quelle serait notre réaction si nous étions mis au pied d’un mur? La confiance et le respect se trouvent être des notions relatives et extensibles, comme l’est la morale en fonction des circonstances; mais n’est-ce pas, en définitive, également le cas dans notre quotidien?
Farscape nous renvoie à nous-même et à ce que nous croyons sur nous. Cette série nous dit que tout peut être remis en question du jour au lendemain et que, face à cette remise en question, nos comportements peuvent se modifier. Farscape nous rappelle qu’il est plus facile de juger confortablement assis dans nos fauteuils qu’affrontant de plein fouet les problèmes. Serions-nous dignes de l’opinion que nous avons de nous si nous nous retrouvions plongés dans l’inconnu et la difficulté, ne cherchant qu’à survivre?
Le regard dépend donc de l’endroit d’où on le porte. Changeons de place, il se modifiera. Et c’est en cela que Farscape est intéressant: cette série nous montre qu’il n’existe pas qu’une seule vérité et que plusieurs avis différents sur un seul et même sujet peuvent tous être participatifs de cette vérité. Toutes les manières de voir le monde, ou, en ce cas précis, l’univers, peuvent chacune avoir leur part de sagesse.
De même, Farscape nous dit que nous avons toujours le choix. Malgré les imprévus qui nous tombent dessus, la dernière décision nous appartient toujours. Le destin dépend de nos choix et donc de nos actes et non d’une prédestination déjà établie. Car, dans un univers en constant changement, nous sommes nous-mêmes changeants et de nos actes dépendent les futurs.

Six Feet Under et la recherche du bonheur

Lorsque je regarde la saison deux de Six Feet Under, je me demande pourquoi il est si difficile d’être heureux. Qu’est-ce qui empêche les gens qui s’aiment de communiquer? Que ce soit Nate, qui n’arrive pas à dire à Brenda qu’il est malade, ou Brenda, qui ne parvient pas à partager son mal être avec Nate, alors qu’ils sont sur le point de se marier… ou encore Claire et sa mère, Ruth, qui ne parviennent pas non plus à communiquer, ne serait-ce que pour échanger sur ce qu’elles ont fait de leur week-end…
La saison deux est un peu différente de la première, moins drôle, moins délirante, mais elle gagne justement en profondeur. Le caractère des personnages est établi et l’on entre dans leur intimité, dans leurs relations des uns aux autres. Et ce qui est premièrement, primitivement visible, c’est qu’ils ont beau s’aimer, ils ne parviennent pas à avoir une relation « intime », dans le sens spirituel, avec ceux qu’ils aiment le plus. Et c’est étrange… Pourquoi les mots nous échappent-ils lorsque nous sommes face à ceux que nous aimons? Est-ce la peur qui nous étouffe? Celle de devoir affronter la réalité à travers les yeux de l’autre? Celle d’être rejeté pour avoir montré ce qu’il y avait vraiment au fond de nous? Ou avons-nous peur que l’autre soit incapable d’accepter, de supporter, cette vérité?
Sarah, la sœur de Ruth, qui vient juste d’apparaître, est un personnage très intéressant. Elle est une sorte de regard extérieur qui reparaît brusquement. Un regard mal accepté mais non dénué d’une certaine sagesse. C’est elle qui dit à Claire ce que cette dernière a sous les yeux depuis le début mais qu’elle n’a su voir jusque-là. Que ce soit, d’ailleurs, quant à son talent de peintre naissant, ou quant à sa mère. Sarah distille les conseils sans les assener comme des vérités. C’est peut-être en ceci que réside sa force.
Je ne peux bien entendu commenter que ce que j’ai vu. Ce que j’aime aussi chez Sarah, c’est qu’elle a vécu sa vie, comme elle l’entendait, sans tenir compte de ce qui l’entourait. On peut l’accuser d’égoïsme mais je ne pense pas qu’elle le soit, du moins dans une certaine mesure. Elle a juste décidé, un jour, de vivre sa vie comme elle l’entendait, et dans une société normalisée, où il faut trouver sa place et entrer dans le cadre, cela ne peut que déplaire. C’est d’ailleurs ce qui est sous-jacent chez Claire : elle aussi est différente, elle aussi veut penser différemment, mais pour le moment elle se cherche, elle ne sait pas encore ce qu’elle est ni ce dont elle est capable. Mais les potentialités sont là. Il faut juste qu’elle ait le courage d’aller au bout d’elle-même.
Et c’est ce qui est intéressant dans cette série : les personnages, leur face à face avec leur moi profond, et ce qu’ils découvrent sur eux-mêmes. Le fait, aussi, qu’ils ne parviennent pas toujours à se trouver et la solitude dans laquelle cette recherche les plonge. Comme si avant de s’être accepté, l’on ne pouvait qu’être seul. Comme si durant le tâtonnement pour faire remonter ce que l’on a au fond de soi, on ne pouvait qu’être seul, sorte d’initiation de soi-même. Les personnages, oui, sont malheureux, mais il leur faudrait peu de choses pour ne plus l’être. La recherche du bonheur est un chemin douloureux mais si le but est atteint, alors le parcours n’aura pas été inutile, puisqu’il les aura fait grandir.